Darnassus

"Meneth? Viens, vite, dépêche-toi, ta femme va accoucher!"

L'intéressé, un elfe de la nuit aux cheveux violets qui était penché sur de vieilles cartes poussiéreuses, releva la tête d'un air étonné et sortit de la pièce sans dire mot. Il s'élança promptement dans les rues de Darnassus jusqu'à arriver à une petite bâtisse fort commune.
Il passa la porte, toujours en courant, et monta quatre à quatre la volée de marches qui le séparait du premier étage. L'elfe s'engouffra dans une des chambres et y trouva sa femme, une elfe aux longs cheveux blancs, adossée à la tête du lit, tenant dans chacun de ses bras un nouveau-né. Deux sœurs jumelles.
La femme tendit le premier nourrisson à son mari.

"Meridia...", souffla-t'elle.

"Et Deliantha.", chuchota Meneth en prenant le deuxième bébé dans ses bras.






"Meridia? Deliantha? Descendez de cet arbre les filles, on va manger."

Les deux sœurs avaient maintenant 8 ans, et toutes deux étaient en parfaite santé, joyeuses et épanouies. Deliantha aimait s'amuser, découvrir de nouvelles choses, faire des choses interdites; alors que Meridia était plus réservée, sérieuse, elle tentait en vain d'éviter des ennuis à se sœur.
L'une avait des cheveux longs, plus noirs que la nuit, alors que l'autre les avaient aussi blonds que le Soleil. Elles partageaient tout, savaient tout l'une de l'autre, ressentaient les mêmes émotions, mais les traitaient différemment. Ce qui rendait triste l'une d'entre elles serrait le cœur de l'autre au point de lui faire ressentir sa mélancolie, et ce qui égayait l'une illuminait le cœur de sa jumelle.

Elles rentrèrent chez elles expressément suite à la demande de leur père, pour retrouver leurs parents qui les attendaient à table.

"Qu'est-ce qu'on mange?"

"Du chou farci et du cerf. Allez, dépêchez vous de passer à table avant que ça ne refroidisse."

Pas de doute, en plus d'être prêtresse au temple d'Elune, leur mère, Freja, était excellente cuisinière. Leur père était quant à lui un des conseillers militaire de Tyrande Murmevent.
Une fois le repas terminé, Meneth prit la parole:

"Bien. Comme vous le savez déjà demain vous devrez choisir votre voie. Je sais que vous y réfléchissez déjà depuis un long moment mais, maintenant, j'aimerai connaître votre choix."

"La prêtrise!", s'exclama aussitôt Meridia.

"Excellent choix.", répondit Freja en souriant.

"Et toi Deliantha? Qu'as tu décidé?"

L'estomac de la jeune elfe se noua. En fait elle n'avait pas encore pris sa décision. Contrairement à certains que rien n'intéressait, elle, aurait aimé étudier toutes les branches possibles. Le druidisme, la chasse, la prêtrise... Tous l'attiraient à part égale, et rien ne la repoussait.

"La prêtrise également...", souffla-t'elle sans réelle conviction.

Son père fronça les sourcils.

"Hum... Je n'ai pas l'impression que c'est ce que tu désires vraiment... Es-tu bien sûre de ton choix? Tu ne dois pas te sentir forcée de faire ça parceque ta mère et ta sœur le font."

"Non, non, c'est bien ce que je veux faire!"

"Dans ce cas... Vous pouvez aller dormir, il ne faudrait pas que vous soyez fatiguées demain."






"Deliantha! Deliantha réveille-toi!"

Meridia essayait tant bien que mal de réveiller sa sœur, endormie pendant le cours d'histoire.
Après plusieurs tentatives Deliantha finit par se réveiller, et tenta de raccrocher à la voix lancinante de leur professeur:

"...à la fois des chefs spirituels et de puissantes combattantes au service de leur peuple. Quand les elfes de la nuit partaient en guerre, les Sœurs d'Elune se battaient aux côtés des soldats en chantant à la gloire d'Elune et en invoquant son pouvoir. Souvent, la déesse lunaire réagissait en punissant de son courroux nos ennemis. On dit même que les prêtresses pouvaient invoquer un semblant de lune en pleine lumière du jour afin d'octroyer la force d'Elune aux elfes de la nuit, plutôt nocturnes. Après une bataille, les prêtresses priaient pour les blessés et leur apportaient des soins."

Il n'y avait rien à faire, cela faisait deux ans que Deliantha étudiait tout ça et elle n'était pas intéressée le moins du monde. Surtout par les cours théoriques. A quoi est-ce que ça allait bien pouvoir lui servir tout ça? En fait même les cours pratiques ne la motivaient pas... Soigner ses alliés, c'était bien beau, mais elle voulait avant tout combattre.


Quelques jours plus tard


Comme d'habitude, avant que le professeur n'arrive, c'était le bazar total dans la salle de cours. Certains sautaient sur les tables, renversaient les chaises, et Deliantha n'était pas la dernière à s'amuser.
Cinq minutes passèrent, puis la porte s'ouvrit, et la silence tomba immédiatement sur la pièce.

"Bonjour tout le monde. J'espère que vous êtes en forme car aujourd'hui nous allons passer à quelque chose de complétement nouveau et bien plus difficile que ce que vous avez étudié jusqu'ici. Pour le moment vous n'avez appris qu'à prodiguer des soins à vos alliés, mes une bataille ne se gagne pas uniquement à l'aide de sortilèges curatifs."

Le professeur faisait durer le plaisir, et cela déplaisait totalement à Deliantha.

" La magie du sacré n'est pas la seule que nous sachions utiliser. Une part d'ombre existe en chacun de nous, et nous allons maintenant apprendre à l'utiliser. Pour cela je vais vous demander de me suivre, nous serons plus à l'aise dans une salle sans table ou chaise."

Alors que les élèves sortaient de la classe en rang Meridia se rapprocha de sa jumelle.

"C'est n'importe quoi, si nous avons choisi la voix de la prêtrise ce n'est pas pour nous battre!"

En réalité Meridia avait toujours été première de classe ici, elle possédait des dons de soigneuse hors du commun.

"Je trouve cette idée plutôt excitante, pense un peu à tout ce que nous pourrions faire avec de telles connaissances!"

Quelques minutes plus tard la classe arriva dans une grande salle vide.

"Bien, espacez-vous bien, mémorisez les gestes que je vais faire, et concentrez vous sur les ténèbres qui sont en vous."

Après trois essais Deliantha réussit à adopter une forme d'ombre parfaite. Elle était à présent translucide, de couleur violacée, on aurait cru que son corps avait perdu de la consistance. Elle était la seule à avoir réussi cet exercice.

"Oh... Jeune fille permettez moi de vous féliciter, cet exercice et très difficile et je ne m'attendais pas à ce qu'un de vous y réussisse."

Deliantha était ravie qu'on la félicite, et elle allait rapidement prendre goût au succès.





Deux ans plus tard Deliantha entrait dans une université spécialisée dans l'enseignement des pouvoirs de l'ombre. Elle avait toujours été la meilleure de sa classe, et ici c'était la même chose. Elle surpassait tous les autres étudiants, écrasait ses rivaux, et aimait ça. Meridia était quant à elle inscrite dans une académie pour soigneurs.

Parallèlement à ses cours à l'université Meneth donnait des "cours" de stratégie militaire à Deliantha.

"A ton avis, pourquoi est-il important de gagner? Que ce soit une bataille, un duel, ou même un jeu?"

"Pour montrer que l'on est supérieur?", demande Deliantha

Son père fronça les sourcils.

"Si on veut. Mais la principale raison c'est que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire. Vois-tu, tu as beau avoir raison sur tous les points, si tu perds on ne retiendra pas tes paroles. On écrira dans les livres d'histoire ce que déclarera le vainqueur, même si c'est un tissu de mensonges."

"Alors tous les moyens sont bons pour gagner?"

"Tant que tu es victorieuse tous les moyens sont bons pour arriver à tes fins. Manipule, triche, trahis. Si tu gagnes on occultera ces actions pour retenir ta victoire. Perds et on te lynchera, on t'insultera, on se moquera de toi."

Toutes ces paroles se gravaient profondément dans le cœur de Deliantha. Elle devait gagner. Toujours. Être supérieure aux autres. Tout le temps.

Quelques jours plus tard, alors qu'ils parlaient de stratégie militaire:

"Ce que tu dois avant tout comprendre, c'est que gagner une guerre ne se fait pas par hasard. Ni par l'intervention de puissances divines. Mérite la victoire et tu n'en seras que plus satisfaite."

"D'accord, mais comment?"

"Tout d'abord tu dois retenir une chose: Il faut prendre les possessions de l'ennemi, et les garder intactes. Par exemple, lorsque tu conquiers une ville, garde à l'esprit qu'il vaut mieux garder la population en vie comme futurs sujets plutôt que de la massacrer. Ensuite ne néglige pas des forces qui pourraient te sembler anodines: une population de civils peut fournir une armée en nourriture, en vêtements etc..."

Deliantha buvait les paroles de son père, qui prit une profonde inspiration avant de reprendre:

"Il y a des choses à prendre en compte pour pouvoir gagner. Tout d'abord tu dois tenir compte des conditions climatiques, et géographiques. Ensuite deux choses: un dirigeant doit être courageux et bienveillant envers ses troupes, mais il doit également se montrer strict. Deuxième chose, la délégation de l'autorité au sein d'une organisation doit être parfaitement comprises. Les châtiments doivent êtres exemplaires tout comme les récompenses."

"Et ces règles ne doivent jamais être ignorées?"

"Jamais. Sauf dans un cas: si le respect d'une de ces règles risque de te priver du but ultime, la victoire, alors passe outre. La victoire, toujours la victoire. Tu ne dois pas hésiter à commettre les pires atrocités si cela te permet de gagner."

Ainsi Deliantha continua à étudier, à l'université et avec son père. Trois ans plus tard elle intégrait l'Ordre des Sœurs D'Elune.

Darnassus, An 20

"Deliantha? Viens..."

Deliantha ne reconnaissait pas l'endroit où elle était. Comme était-elle arrivée là? Et cette voix surgie d'outre-tombe, d'où venait-elle?
Du sable... Du sable à perte de vue, un terrain plat, sans aucun relief. Un désert?

"Deliantha... Je peux te donner le pouvoir..."

Le pouvoir? Elle en possédait déjà plus que n'importe qui. Mais d'où venait cette voix? Il n'y avait aucun endroit où se cacher ici. Une tempête de sable commençait à se lever. Il fallait qu'elle parte d'ici rapidement.

"Deliantha..."


L'elfe se réveilla en sursaut, dégoulinante de sueur. Un rêve? Cela lui avait semblé tellement réel... Elle éclata de rire, amusée par sa stupidité.
Le Soleil commençait à se lever, et Deliantha en fit autant. Cela faisait maintenant 3 ans qu'elle avait rejoint les Sœurs d'Elune et aujourd'hui avait lieu leur réunion mensuelle. Encore une journée ennuyeuse à souhait, sans action. Mais une journée nécessaire.
Comme elle l'avait deviné la journée fut d'une longueur extrême. Elle était une femme d'action, pas quelqu'un qui restait des heures à discuter du pourquoi et du comment.
Malgré tout cette journée fut épuisante, et Deliantha, assommée par les discours pompeux des autres Sœurs, alla se coucher aussitôt rentrée chez elle.

Pendant la nuit elle rêva à nouveau. Le même que la nuit précédente, plus réaliste encore que la veille. Elle refit ce songe toutes les nuits qui suivirent.






Trois mois plus tard


"Deliantha! Attends-moi!"

L'intéressée, qui allait sans se presser acheter de la nourriture, se tourna vers sa sœur.

"Oui?"

"Tu tombes bien, je te cherchais. Tu te souviens des humains et des orcs qui ont débarqué sur nos côtes il y a peu? (Deliantha acquiesça silencieusement) Eh bien Tyrande s'est alliés à eux, afin que nous soyons en mesure de repousser Archimonde et le Fléau."

Deliantha soupira.

"Tyrande se cherche des alliés inutiles, nous n'avons pas besoin de ces sous-races pour vaincre Archimonde."

Méridia étudia longuement le visage de sa sœur, et comprit que ce qu'elle avait tout d'abord prit pour une plaisanterie n'en étais pas une.

"Dans ce cas peux-tu me dire pourquoi le Fléau continue à dévaster nos terres?"

Deliantha, toujours impassible, répondit calmement:

"Parce-que Tyrande n'est pas prête à faire ce qu'il faut pour gagner. Elle ne veut pas sacrifier ses troupes, même si cela lui permettrait de vaincre. Tout ce qu'elle fait est dicté par son éthique sa Morale. Franchement... Qu'importe la vie d'un soldat du rang quand la victoire est à portée de main?"

Méridia n'imaginait pas que sa sœur avait changé à ce point.

"Je ne peux pas croire que tu croies à ce que tu dis. Un soldat, même s'il n'est qu'un simple fantassin, reste un être humain, il a une famille, des amis, peut-être une femme et des enfants. Comment peux-tu porter si peu d'importance à la vie des autres? Aurais-tu perdu la raison? Ou aurais-tu tellement changé sans que je m'en aperçoive?"

Deliantha resta silencieuse plusieurs secondes. Sa sœur était au bord des larmes.

"On vit, on meurt, à un moment ou à un autre. Quelle différence que ce soit aujourd'hui ou demain? Ou dans 10 ans? Autant mourir pour une bonne cause. Autant mourir pour apporter la victoire à son peuple."

"Ton cœur est envahi par l'ombre avec laquelle tu te bats..."

Après avoir lâché cette dernière remarque Méridia repartit d'où elle venait en sanglotant.






Deux jours plus tard


Deliantha se leva promptement du fauteuil dans lequel elle était assise. On venait de frapper à sa porte et elle se dépêcha d'aller ouvrir.
L'elfe qui se tenait sur le pallier ne semblait pas très à l'aise. Sans dire un mot il lui tendit une lettre, visiblement écrite à la va-vite.



Deliantha mit un certain temps à assimiler ce qu'elle venait de lire. Elle ferait honneur à son père et à ce qu'il lui avait appris.
Sans perdre de temps elle rassembla toutes les affaires qu'il lui semblait bon d'emporter et repartit avec le messager, qui les téléporta directement au camp de Tyrande et de ses alliés.






Mont Hyjal


Alors c'était ça les forces des elfes, des humains et des orcs rassemblées? Une armée énorme, comme Deliantha n'en n'avait mais vue, ni même imaginée. Des tentes se dressaient à perte de vue, tandis que des feux de camps illuminaient la nuit. C'était pourtant bien faible comparé aux troupes dont disposait Archimonde.
Deliantha se dirigea vers la tente de commandement, où elle trouva Tyrande en réunion avec Jaina Portvaillant et Thrall.
Ces 2 derniers la saluèrent d'un signe de tête, mais Tyrande lui adressa directement la parole:

"Deliantha... Toutes mes condoléances pour votre père, c'était un grand stratège. Il a été tué par un sortilège lancé contre l'ancienne tente de commandement, il a voulu sauver ses cartes et n'a pas pu sortir à temps." (Deliantha hocha la tête en signe d'approbation) "Je sais qu'il vous a enseigné tout ce qu'il savait, et si vous le souhaitez je vous accepterai avec joie à mes côtés pour me conseiller."

Deliantha resta silencieuse quelques instants. Son père connaissait les risques de son métier, et il n'était pas mort en vain. On ne faisait pas d'omelette sans casser des œufs.

"Merci. Tyrande... êtes-vous prête à faire ce qu'il faut pour gagner?"

Tyrande était la supérieure directe de Deliantha dans l'ordre des Sœurs, et également celle qui dirigeait leur peuple. Deliantha ne voulait pas la provoquer directement, mais ainsi elle disait clairement à Tyrande qu'elle trouvait ses méthodes minables et inefficaces.

"Je ferai ce qu'il faut pour gagner tant que cela ne nuira pas à mon peuple. Je connais vos idées douteuses sur la façon de mener une guerre, mais ce ne sont pas les miennes."

Maitresse d'elle-même l'elfe répondit:

"Alors vous me voyez obligée de refuser le poste."

Alors que Deliantha se retournait pour sortir de la tente, Tyrande l'interpela une dernière fois:

"Consentirez-vous tout de même à vous battre à nos côtés?"

La prêtresse de l'ombre dévisagea tour à tour les trois chefs de guerre avant de répondre:

"Je pense pouvoir faire ça..."

"Bien." (Tyrande interpela un des pages qui se tenait là) "Montrez ses quartiers à madame."

Deliantha salua poliment Tyrande puis suivit le page hors de la tente. Le jeune humain la mena jusqu'à une tente spacieuse et luxueuse. Sans l'écouter vraiment Deliantha comprit que c'était celle de son père avant qu'il ne nous quitte pour un monde meilleur. L'elfe rit intérieurement. Il était drôle que les gens cherchent à atténuer le sens de la mort en lui substituant des expressions stupides. Un monde meilleur? Personne n'en était revenu pour en témoigner...
Elle pénétra sous le grand dais et remarqua qu'il était encore plus grand vu de l'intérieur que de l'extérieur. La tente était en fait constituée de trois pièces. Un hall spacieux, idéal pour recevoir un messager ou n'importe quel visiteur inattendu. Une salle de réunion, dans laquelle trônaient une dizaine de chaises et trois tables, sûrement destinée aux réunions avec l'État major. Enfin restait une chambre. Composé d'un lit, d'un fauteuil, et d'une table sur laquelle trainait encore une grappe de raisins juteux, une bouteille de bon vin, et deux coupes vides; Deliantha comprit rapidement que cette pièce ne servait pas uniquement à dormir. Elle avait depuis longtemps apprit à quoi correspondait le fameux "repos du guerrier", et elle n'était pas surprise que son père ait des relations avec d'autres femmes que sa mère lorsqu'il était en campagne. Sa mère... une femme faible, qui avait des idées totalement absurdes, et qui n'avait aucune personnalité. Elle s'était toujours demandée pourquoi un homme comme son père l'avait épousée.
Il était déjà tard, et Deliantha commençait à sentir la fatigue l'écraser. Elle retira sa longue robe bleu nuit, détacha ses cheveux, et s'allongea dans son lit. Cherchant une position confortable pour dormir, elle passa son bras sous son oreiller et y heurta un objet dur. En soulevant le coussin elle s'aperçut que c'était la dague de son père. La dague avait toujours été l'arme préférée de l'elfe, et le fait qu'elle trouve celle de son père après sa mort aurait pu passer pour un signe du destin. La lame était plus longue que la normale, finement ciselée et terriblement tranchante. La garde, en ivoire, était sculptée et ne glissait pas des mains. Elle se terminait par un crâne de serpent aux crochets apparents, et deux lapis-lazuli lui servaient d'yeux. Elle reconnaissait bien là son père et sa méfiance d'avoir caché une arme ici... au cas où.
Une heure plus tard elle réussit à s'endormir, malgré le brouhaha qui s'élevait du campement.


Le lendemain matin

Les rayons du soleil commençaient à réchauffer la peau glacée de Deliantha quand elle se réveilla. Elle ne s'était pas attendue à une nuit aussi froide après la chaleur intenable de la journée. Elle devrait faire attention la nuit prochaine, ou elle risquait de mourir de froid.
En se levant elle fut étonnée de trouver dans la chambre un bac d'eau brûlante ainsi que deux serviettes. Elle n'allait pas s'en plaindre... Elle se plongea dans l'eau, et toutes les courbatures de la nuit s'évanouirent en un clin d'œil. Elle découvrit une grosse malle au pied de son lit. Visiblement ils ne faisaient pas les choses à moitié ici, puisque quelqu'un avait été dépêché chez elle afin d'en ramener ses affaires. Elle enfila une robe noire, avala le petit-déjeune qu'on lui avait gracieusement apporté, puis sortit de sa tente.
Le Soleil était déjà brûlant, et la peau fragile de Deliantha ne le supportait pas très bien. Elle se dirigea vers le centre de commandement où elle trouve Tyrande, une fois de plus, accompagnée de Thrall et Jaina.

"Ah, Deliantha. Avez-vous bien dormi?", demanda Tyrande en souriant.

"Mieux que je ne l'aurais imaginé. Je vous remercie d'avoir fait chercher mes affaires, c'était une aimable attention."

Tyrande fit un signe de la main qui signifiait que cela était normal et s'adressa à nouveau à elle:

"Les troupes du Fléau progressent rapidement, et l'assaut final ne va pas tarder. Malfurion va canaliser les forces de l'arbre monde pour détruire Archimonde, mais il a besoin de temps. Nous devons retenir les forces des morts-vivants pendant ce temps. Le problème c'est que les chefs de guerre ennemis et leurs troupes d'élites enfoncent nos lignes comme un couteau dans une motte de beurre." (Elle regarda Deliantha pensivement) "Nous allons mettre à votre disposition les meilleurs combattants que nous possédons, et vous aurez pour mission d'anéantir ces troupes d'élite. Si vous l'acceptez, bien entendu."

Deliantha sentait les regards des trois chefs de guerre peser sur elle.

"J'accomplirai cette mission avec plaisir."

Un soupir de soulagement s'échappa d'entre les lèvres de Jaina, qui se tourna vers elle:

"Le destin du monde est entre vos mains à présent."

"J'essaierai de ne pas le faire tomber.", plaisanta Deliantha.

Visiblement la blague n'avait pas été appréciée et tous affichaient maintenant une grimace gênée sur le visage. Pour l'humour elle repassera.
Elle sortit de la tente de commandement pour se diriger vers la sienne.

En rentrant dans son abri elle trouva une dizaine de personnes qui l'attendaient. Deliantha sourit. Sûrement son escouade d'élite. Un orc musclé tenant une imposante hache. Une voleuse elfe, svelte et gracieuse. Un paladin humain au sourire charmeur. Un chasseur nain crasseux spécialisé dans la pose d'explosifs en tous genres. Un mage gnome dynamique et rieur. Un druide tauren imposant. Et pour finir un chaman troll au visage entièrement tatoué.

Deliantha respira profondément, et se força à prendre une vois la plus autoritaire possible:

"Je suppose que vous savez tous pourquoi vous êtes là. Si vous êtes ici je suppose également que vous saurez agir sans que je vous dise quoi faire. Je ne vous demanderai qu'une seule chose: lorsque je vous donne un ordre obéissez y immédiatement, même si vous n'en saisissez pas le sens immédiatement."

Son auditoire la fixait silencieusement.

"Bien, allons-y."

Alors qu'elle se dirigeait vers la sortie de la tente, un humain y rentra et percuta Deliantha de plein fouet. Sans le regarder elle lança:

"Mais qu'est-ce que... vous ne pouvez pas faire attention?"

"Veuillez m'excuser gente demoiselle, je souhaiterai parler à la prêtresse Deliantha..."

L'elfe se résigna à le regarder et... tomba sous le charme de l'humain. Grand, musclé, des cheveux bruns en bataille, un regard ténébreux, une voix à faire fondre un iceberg... Quel était ce nouveau sentiment? Deliantha était comme hypnotisée.

"Mademoiselle?"

"Euh oui je euh... je suis Deliantha.", baragouina-t'elle.

L'humain la détailla de la tête aux pieds. L'elfe sentait son regard s'appesantir sur elle, comme s'il la déshabillait des yeux. Elle s'empourpra.

"Pour être celle qui va diriger une escouade d'élite je vous aurai crue plus vieille!", s'exclama l'homme en haussant les sourcils.

"Eh bien, pourquoi vouliez-vous me voir?"

"Excusez-moi, en fait je pars avec vous. Et permettez moi de me présenter, je m'appelle Eleann, pour vous servir.", dit-il en lui baisant la main.

Que devait-elle penser de tout ça? Sûrement rien, pour le moment du moins. Ils avaient une mission à accomplir.
Sans dire un mot de plus Deliantha et son groupe empruntèrent le portail qui leur était destiné.

Un instant plus tard ils se retrouvèrent au milieu du champ de bataille. Le bruit des lames d'acier qui s'entrechoquaient, mêlé à celui des cris de guerre des combattants, était assourdissant.
Sans perdre un instant tous se mirent en position de combat. Deliantha et les autres sorciers faisaient pleuvoir une grêle de sortilèges qui dévastaient les rangs ennemis, tandis que le troll prodiguait des soins à Eleann et aux autres combattants au corps à corps. L'humain était impressionnant, ses épées fendaient l'air à une vitesse surprenante, taillant la chair de ses ennemis et broyant leurs os. On ne s'était pas moqué d'elle en lui disant qu'elle serait à la tête d'une escouade d'élite.
Malgré tout les rangs ennemis ne semblaient pas s'éclaircir. Des morts-vivants arrivaient sans cesse. C'est alors qu'elle le vit. Un nécromancien s'attelait à ramener d'entre les morts tous ceux qui tombaient au combat. Elle cri alors à la voleuse:

"Alicia! Le nécromancien, débarrasse nous-en!"

L'elfe aquiesça et se mit en mouvement vers le nécromancien.
Deliantha, le mage et le chasseur s'appliquèrent alors à abattre tous les ennemis qui se dressaient sur la route de la voleuse.
Alicia sprintait vers sa cible, qui l'avait maintenant aperçue et lançait toutes sortes de projectiles dans sa direction. Pour le moment elle réussissait à tous les esquiver, mais ça ne pourrait pas durer indéfiniment...
Elle était maintenant à 40 mètres du nécromancien, et Deliantha et ses compagnons ne pouvaient plus l'aider. 35 mètres. Le sorcier mort-vivant lança un nouveau sortilège. 30 mètres. Le projectile verdâtre allait percuter l'elfe de point fouet. 25 mètres. Au moment où le sortilège aurait du pulvériser l'elfe celle-ci disparut un instant, avant de réapparaitre directement dans le dos du nécromant. Sans qu'il ait le temps de comprendre ce qui lui arrivait les dagues de l'elfe lui percèrent le corps en une multitude d'endroits.
Après la mort du sorcier la bataille fut rapidement gagnée, et Deliantha put rentrer au campement avec son escouade au complet.

Il était déjà tard et Deliantha laissa quartier libre à ses compagnons pour la soirée. Elle repensait à Eleann. Séduisant, fort, intelligent... L'elfe était irrésistiblement attirée par l'humain. Repenser à lui la faisait frissonner.

Deux autres jours passèrent ainsi, l'équipe de Deliantha faisant un massacre dans les rangs ennemis, sans perdre un seul membre. Et pendant ce temps elle se rapprochait de plus en plus d'Eleann, avec qui elle devenait chaque jour plus intime.

Le lendemain, après une journée de lutte acharnée, Tyrande demanda à parler urgemment à Deliantha. En pénétrant sous la tente de commandement l'elfe sentit que l'atmosphère était tendu, comme si un orage allait éclater. Tyrande, Thrall, et Jaina affichaient une mine morose.

"Pour ne rien vous cacher l'assaut final sera lancé demain par les troupes du Fléau. Nous savons de source sûre qu'un groupe constitué des plus puissants démons contournera nos forces pour aller directement s'en prendre à Malfurion. Nous savons exactement par où ils passeront, et vous et votre escouade devrez être sur place pour les arrêter. Vous vous en doutez, l'échec n'est pas acceptable."

"Alors nous réussirons. Puisse Elune guider votre bras."

De retour dans sa tente elle convoqua ses compagnons afin de leur exposer la situation, et leur expliquer leur objectif du lendemain. Deliantha savait au fond d'elle-même que ce serait là une mission sans espoir de retour. Elle ne les laissa partir que plusieurs heures après la tombée de la nuit.

"Eleann? J'ai encore à vous parler."

L'humain la fixa d'un air interrogateur et plein de désir.

"On ne sait pas de quoi demain sera fait...", dit-elle en laissant choir sa robe à ses pieds.

Elle était à présent nue devant l'homme qu'elle désirait, sa peau claire parcourue de frissons. Elle était aussi froide à l'extérieur qu'elle n'était chaude à l'intérieur d'elle-même. Quelle était cette étrange sensation?
Devant l'absence de réaction d'Eleann elle se rendit compte à quel point elle était ridicule. Elle allait se rhabiller quand l'humain l'embrassa fougueusement puis il la porta jusqu'à sa chambre.


Le lendemain matin

Elle se réveilla à l'aube, à côté de son amant, encore fatiguée après une nuit qui n'avait pas été de tout repos. Elle se glissa discrètement hors du lit et alla se laver et s'habiller. Afin d'être mieux protégée des coups qu'elle pourrait prendre, Deliantha s'accrocha plusieurs lanières de cuir sur le corps.
Elle repensa à la nuit qu'elle venait de de passer et rit. Il était amusant de remarquer à quel point la vie était perverse. Elle qui ne lui avait jamais accordée de valeur venait de la découvrir le jour où elle allait sûrement la perdre.

Deux heures plus tard Deliantha et ses compagnons empruntaient un portail vers l'endroit où ils devaient intercepter la Légion.
Ils avaient normalement une vingtaine de minutes de marche jusqu'à la clairière, et cela se fit dans un silence total. Pourtant plus elle approchait du point de rencontre plus Deliantha sentait que quelque chose clochait. A cette distance ils auraient du entendre le bruit fait par l'ennemi.
En arrivant dans la clairière, Deliantha la trouva vide. Leur avait-on donné de fausses informations? Personne n'osait parler, et soudain une multitude d'ennemis sortirent des fourrés alentours. Des gangregardes, des traqueurs gangrenés, des nécromanciens, des morts-vivants en tous genres, et même un Seigneur de l'Épouvante.

"UNE EMBUSCADE!", s'écria Eleann fou de rage.

"Regroupez-vous, abattez les sorciers en priorité!"

La tranquillité de l'endroit fut bientôt remplacée par le chaos total. L'herbe verdoyante fut rapidement noyée sous le sang et les tripes ennemies. Deliantha et ses compagnons abattaient leurs ennemis avec une efficacité hors du commun, mais ceux-ci étaient bien trop nombreux.
Ce fut l'orc qui tomba le premier, la tête tranchée nette par un gangregarde. Il fut suivi de peu par le paladin, qui mourut la jugulaire arrachée par un traqueur. Le gnome succomba peu de temps après, désintégré par un sort de nécromant.
Deliantha et ceux qui tenaient encore debout luttaient du mieux qu'ils pouvaient pour leur survie, mais cela était vain. Le chaman fut tué par un groupe de morts-vivants qui l'avaient encerclé, sans que personne ne puisse l'aider. Fou de rage, le druide percuta ses adversaires à une vitesse prodigieuse, mais fut arrêté brutalement par une paire de gangregardes armés jusqu'aux dents. Submergé par le nombre d'ennemis, le chasseur nain fut tué sans que Deliantha s'en aperçoive.
Sur une escouade de 9 personnes sur-entraînées seules 3 étaient encore vivantes. Alicia et Eleann faisaient de leur mieux pour empêcher l'ennemi d'approcher Deliantha, et éventraient leurs adversaires avec une rapidité et une précision surnaturelle. Pourtant la partie était perdue d'avance. Alicia à son tour fut tuée, dépassée par un trop grand nombre d'ennemis. Eleann fut à son tour touché par plusieurs projectiles lancés par les nécromanciens du Fléau.

Deliantha hurla de rage et de douleur:

"NON!"

La voix qu'elle entendait dans ses rêves résonna dans sa tête:

"Tue les... Tue les tous."

Deliantha perdit le contrôle de son corps et commença à léviter à 3 mètres du sol, les bras en croix. Puis elle se mit à tourner sur elle-même à toute vitesse. Des éclairs jaillirent de son corps et à frappèrent tous les ennemis encore vivants, les réduisant en une immonde pâtée sanglante.
Elle retomba violemment au sol, et la voix s'adressa à nouveau à elle:

"Rejoins-moi maintenant... Je pourrai réaliser tes rêves les plus fous."

Sans vraiment se rendre compte de ce qu'elle faisait, Deliantha se releva et partit retrouver la personne qu'elle voyait en rêve dans le désert de Silithus.

Silithus

Elle y était enfin arrivée. Silithus, un désert brûlant, peuplé d'insectes d'une taille anormale. Depuis les événements du Mont Hyjal la voix n'avait cessé de lui parler, et Deliantha avait également pu lui répondre. Grâce aux indications qu'elle lui avait fourni elle arriva à ce qui ressemblait vaguement au camp d'une grande armée. La voix l'invita à traverser le campement jusqu'à la tente qui se trouvait en ce milieu, et c'est donc ainsi qu'elle se retrouva en train de marcher à travers le camp, sans que personne ne cherche à l'arrêter.
Une armée constituée d'humains, d'elfes, de nains, de gobelins, d'orcs... toutes les races se côtoyaient dans cet immense camp.
Prenant une grande inspiration elle entra dans la tente. Celle-ci était bien plus vaste que celle qu'elle avait occupée il y a peu, agréablement décorée et aménagée.
Et lui était là, au milieu de la pièce. Un être qui semblait s'apparenter à un humain. Le vieillard portait une armure de plaques dorée, et était assis sur un trône en chêne.

"Deliantha... tu en as mis du temps... Mais approche toi que je puisse te voir. Depuis le temps que je communique avec toi je suis heureux de te voir face à face."

La voix gutturale de l'homme était réellement désagréable. En s'approchant de lui l'elfe se rendit compte que son visage n'était pas vraiment plus attirant. Il était même plutôt hideux.

"Enchantée", lâcha-t'elle.

"Je te dégoute n'est-ce pas? Pas la peine de nier, je lis en toi comme dans livre ouvert. Mais assieds toi, je t'en prie."

Il lisait dans ses pensées? Impossible, il devait bluffer. Prenant une chaise elle l'interrogea:

"Alors qui êtes vous? Et pourquoi m'avez-vous fais venir? Qu'est-ce que cette armée dehors?"

"Je m'appelle Zieg. Et cette armée dehors est la mienne. Vois-tu... Celui qui désire la paix dois se préparer à se battre pour la gagner. Et la guerre que je prépare sera la plus grande jamais menée."

"Et pourquoi suis-je ici?"

"La réponse s'impose d'elle-même. J'ai besoin de toi évidemment."

"Et pourquoi ça?"

Le regard lubrique de l'homme devenait de plus en plus insupportable. Deliantha n'avait qu'une envie, et c'était de quitter cet endroit au plus vite.

"Tu poses beaucoup de questions, mais il est déjà tard. Accepterais-tu de rester ici pour la nuit?", demanda-t'il avec une lumière perverse dans les yeux.

"Je suppose que si je veux des réponses à mes questions je n'ai pas le choix?" (Zieg haussa les épaules) "Alors je resterai."

Souriant, le vieil homme se déshabilla devant elle, alors qu'elle détournait les yeux. Puis, se faufilant sous les couvertures de son lit, il lança:

"Je suis désolé, mais je n'ai qu'un lit..."

D'une voix sèche l'elfe répondit:

"Je vous remercie de votre bonté, mais je vais me contenter de dormir au sol."

Zieg ronchonna mais n'insista pas.

La nuit se passa sans incident, et Deliantha se leva de bon matin afin de se préparer avant que son hôte ne se réveille. Elle était bien décidée à repartir dans l'heure si l'homme ne lui dévoilait pas ses intentions.

Alors qu'elle finissait de s'habiller Deliantha entendit Zieg l'appeler:

"Deliantha? Ah tu es ici. Bien. Nous allons pouvoir discuter un peu ce matin, mais pas ici."

Il invoqua un portail et l'emprunta sans dire un mot de plus. Prenant cela comme une invitation Deliantha y entra à son tour.

Elle se retrouva dans un endroit qu'elle ne connaissait absolument pas, une plaine déserte, sans aucune végétation ni forme de vie animale.

"Hum. Tu veux savoir pourquoi je t'ai fais venir ici? La réponse est simple et tu aurais pu la deviner. A mon âge je ne suis plus apte à diriger une armée sur le champ de bataille. J'ai besoin de quelqu'un qui puisse le faire à ma place. Et tes compétences de stratège font de toi la candidate idéale. Mais trève de bavardages, passons à la pratique."

"La pratique?"

"Oui. Bats toi avec moi. Envoies tout ce que tu as, et ne te retiens pas."

"C'est ridicule, je risque de vous tuer... Dois-je vous rappeler que je suis l'être mortel le plus puissant qu'Azeroth ait porté?"

"Fais ce que je t'ai demandé.", répondit le vieillard, amusé.

S'il le voulait vraiment Deliantha ne se retiendrait pas. Poussant sa concentration à son maximum, l'elfe envoya une puissante attaque mentale contre l'humain. Celui-ci ne broncha pas. Intriguée, Deliantha lança tout ce qu'elle pouvait contre lui. Et rien ne semblait faire effet. Pendant ce temps l'homme semblait s'amuser de son échec.
Puis il ne fut plus là. En une fraction de seconde il se retrouva dans le dos de la prêtresse, et lui ficha un poignard dans le bas du dos.
Deliantha tomba à quatre pattes, paralysée. La douleur l'empêchait de bouger, et des larmes commencèrent à perler au bord de ses yeux. Deliantha ne comprenait pas. Il était impossible d'être aussi rapide. Et la douleur dans son dos était insoutenable. Elle pleurait maintenant à torrents, tellement la douleur était abominable, et se fit saigner les doigts en essayant d'agripper la terre au sol.

"Les apparences sont parfois trompeuses n'est-ce pas?" (L'homme riait bruyamment) "L'homme le plus puissant c'est moi. Et toi...tu es faible.", dit-il en lui envoyant un puissant coup de pied dans les côtes.

"P...Pourquoi?", marmonna Deliantha, le visage baigné de larmes.

Elle gisait maintenant face contre terre, le sang coulait à flots de sa blessure, et elle sentait ses forces l'abandonner petit à petit.

"Pourquoi?" (Zieg rit aux éclats) "Parceque tu te crois puissante, alors tu avais besoin d'une bonne correction."

Il lui retira la dague qu'il lui avait plantée dans le dos puis reprit:

"Leçon numéro un: Ne sous-estime pas ton adversaire."

Deliantha se rendait maintenant compte à quel point l'homme était dangereux.

"Mais, dans ma grande bonté, je suis prêt à t'apprendre ce que je sais." (La leur lubrique de la veille s'alluma à nouveau dans les yeux du vieil homme) "Mais cela aura un prix, bien sûr..."

Bien sûr. Malgré le dégôut qu'elle éprouvait pour Zieg elle était prête à faire n'importe quoi pour devenir plus forte. Même si pour cela elle devait partager sa couche.




C'est ainsi qu'un an plus tard, après des journées d'entièrement épuisantes, et des nuits qui l'étaient tout autant, Zieg s'adressa à Deliantha:

"Alors, que penses tu de l'entrainement que je te fais suivre?"

- Je pense... Je pense qu'il commence à porter ses fruits., murmura-t'elle d'un ton aussi humble qu'il lui était possible.

En effet, même si les exercices imposés par Zieg étaient d'une difficulté inhumaine, les pouvoirs de Deliantha s'étaient développés de manière exceptionnelle en un an. Non seulement ses pouvoirs, mais aussi ses réflexes, son endurance, sa force, sa rapidité, et sa résistance à la douleur...
L'elfe se souvenait encore de ce que l'homme lui avait dit un jour en la voyant échouer à l'une de ses épreuves: "La persévérance crée la force". Ce principe s'était révélé exact.

- Commence? Tu as fais de gros progrès, c'est vrai. Et tu pourrais certainement en faire encore. Cependant, il est temps pour toi de partir.

- Comment ça?

- Tu ne te souviens pas? Je t'ai fais venir ici pour une raison bien précise, rappelle toi. La grande armée pour la paix est prête à accomplir sa mission maintenant, et tu seras son général.

- Mais je ne suis pas prête! Il me reste tant à apprendre...

- Il y a toujours à apprendre. Si je t'estime prête alors tu l'es.

- Soit. J'accomplirai votre volonté.

- Alors va préparer tes affaires, vous partez demain à la première heure.", dit-il en souriant.

L'elfe se mit tout de suite à la tache. Elle n'avait en réalité pas grand chose à emporter, mais elle ne voulait rien oublier. Elle portait déjà sur elle sa robe habituelle, et n'eut à emporter comme seule autre tenue que l'habit de cuir qui lui servait en cas d'affrontements au corps à corps. Il se résumait en fait à un débardeur court et une minijupe, afin que ses vêtements ne la gêne pas dans ses mouvements.
Elle prépara ensuite ses deux épées courtes: Étincelle et Flocon. Deux armes qu'elle avait faites fabriqué quelques mois auparavant. Elle saisit tout d'abord Flocon. La garde et la poignée de l'épée étaient en adamantite noire, et celle-ci était sculptée suivant la forme d'une tête de loup. Sa lame en fer froid (minerais spécial forgé à une température extrêmement froide) est un fléau pour les créatures de feu, et reste mortel pour n'importe quelle créature vivante. Puis elle s'empara de sa seconde épée, Étincelle. Entièrement argenté, le pommeau avait l'aspect d'une tête de chouette et la garde de l'arme présentait des lapis-lazulis incrustés. Sa lame était aussi brûlante que le souffle d'un dragon, et pouvait faire fondre n'importe quel acier.

Une fois ses affaires prêtes elle s'en retourna auprès de Zieg.

"Puis-je vous demander où nous partons?

- Fort Magrosh, tu connais?

Fort Magrosh était une forteresse du sud des Tarides, emplacement stratégique pour surveiller les allés et venus entre cette zone et les Milles Pointes.

- De nom. Et qu'allons nous y faire?

- Voyons... Le détruire? Non, ça ne va pas. Le raser alors.

- Pour quelle raison?

- C'est un point stratégique important pour la horde, il nous faut l'anéantir. Bien sûr vous écraserez toute la résistance qui pourrait s'opposer à vous en chemin.

- Vos désirs sont des ordres.", dit-elle en s'inclinant.




Deux semaines plus tard

"Madame? Nous arrivons en vue du Fort.

L'orc qui se tenait devant elle n'était autre que Gorgrim, celui qui dirigeait la bande de lourdauds qui lui servait d'armée.

- Alors faites ce que vous avez à faire. Préparez le campement, nous attaquerons pendant la nuit. Envoyez des éclaireurs explorer le terrain, je veux voir tous nos archers sur les hauteurs. Et préparez leur de quoi enflammer leurs flèches. Ensuite faites placer la cavalerie sur les flancs, qu'ils soient prêts à intercepter et poursuivre tout ce qui tentera de s'enfuir. Et peu de temps avant le début de l'assaut je veux qu'un groupe de tueurs se glisse dans la forteresse et tue le maitre des wyvernes ainsi que les bêtes qui l'accompagnent. Pas de survivants, pas de témoins, on fait ça proprement. J'ai été claire?

- Très claire. Mais, comment allons nous nous introduire dans la forteresse?

Deliantha haussa un sourcil.

- J'en fais mon affaire., rétorqua-t'elle.

- Mais... Sans vouloir vous offenser la forteresse n'a jamais été prise...

- Douterais-tu de mes compétences?, demanda Deliantha en foudroyant son interlocuteur du regard.

- Non maitresse, bien sur que non. Je vais faire ce que vous m'avez demandé."


Trois heures plus tard il faisait nuit noire. Les assassins venaient de rentrer et confirmaient la mort du maitre de vol. Tout se passait comme prévu.
C'était maintenant à elle de jouer. Elle fit un signe de tête à Gorgrim, qui fit à son tour un signe à ses soldats.
Deliantha commençait à se concentrer pour lancer son sortilège et tout à coup l'énorme porte de la forteresse vola en éclat dans un fracas assourdissant.
Alors les fantassins de Gorgrimm s'engouffrèrent dans la brèche nouvellement apparue et traquèrent toute trace de vie dans la ville. Les gardes ne pouvaient agir, l'effet de surprise faisant ici son office. Les flèches enflammées incendiaient les maisons, et la cavalerie massacrait tous ceux qui tentaient de fuir, comme prévu.
L'elfe sourit. La mission était une réussite totale.

"Madame? La ville est prise. Cependant...

- Cependant quoi?

L'orc se tortillait d'un air gêné.

- Eh bien... Il semblerait que... En fait un garde a réussi à s'échapper avec une wyverne.

Le calme qui régnait depuis quelques minutes fut à nouveau brisé. Deliantha explosa de rage.

- Comment? Je croyais que les wyvernes avaient toutes été tuées? A cause à ce ramassis d'idiots pas capables de tuer correctement une wyverne les autres villages vont savoir qu'on arrive. Allez me chercher ceux qui ont mal fait leur boulot., hurla-t'elle.

L'orc partit sans demander son reste,et revint rapidement avec les six incapables.

- Exécutez les. L'incompétence est un défaut que je ne supporte pas. Et ensuite on lève le camp, direction la croisée. Et ne discutez pas."

Deliantha grimpa à bord de sa diligence, elle avait besoin de repos après avoir lancé un sort tel que celui qu'elle avait lancé. Elle s'endormit rapidement.


Elle voyait son père face à elle.

"Père?

- Deliantha... Ma fille. Te rends-tu compte de ce que tu fais? Tuer des innocents, est-ce tout ce que je t'ai appris?

- C'est un sacrifice nécessaire...

- Comment? Nécessaire à quoi? A nourrir ta soif de victoire? Je n'aurais pas cru ça de toi.

- C'est vous qui m'y avez donné goût. Et je ne fais tout ça que pour le plus grand bien.

- Qu'Elune te vienne en aide ma fille tu perds la tête! Le plus grand bien? Tuer des milliers de civils? Il n'y avait rien de nécessaire là dedans.

- Je me bats pour instaurer la paix!

- On n'apprend pas à un enfant à respecter les autres en lui donnant des coups de bâton. Tu sembles avoir oublié tout ce que je t'ai appris. Tu n'es plus ma fille."


Deliantha se réveilla en sursaut. Les paroles de sont père résonnaient encore dans sa tête. Tu n'es plus ma fille. Plus ma fille... Rien qu'un mauvais rêve.
La diligence était à l'arrêt et elle en sortit promptement.

"La Croisée madame, nous y sommes. Nous avons été attaqués plusieurs fois en chemin, mais rien de grave.

L'elfe hocha la tête.

- Alors préparez vous à l'assaut. Ne tuez que les soldats et ceux qui tentent de résister."

Grogrimm partit sans contester ses ordres.

En quelques minutes les défenses de la ville furent anéanties, la supériorité numérique de l'armée étant un atout incontestable.

"Nous avons pris possession de la ville, mais il y a un petit soucis. Il n'y avait que très peu de soldats ici, et juste deux civils. Deux femmes. Enfin une femme, et une autre qui doit être sa fille.

- Conduisez moi à elles."

Ils traversèrent rapidement le village et tombèrent sur elles. L'une devait avoir une trentaine d'année et sa fille pas plus de huit ans.

Elle s'adressa à la femme.

"Où sont-ils tous partis?

- Je ne vous dirai rien.

- J'en doute. (Elle désigna la gamine) C'est ta fille?

- Non.

Deliantha s'approcha de la jeune fille et dégaina son épée pour la pourfendre.

- Laissez la! C'est bien ma fille., s'écria la femme, résignée.

- Vous devenez raisonnable alors. (Elle sourit) Où sont ils partis?

- Je ne sais pas.

- Gorgrimm? Apporte moi de la ficelle.

Quelques instants plus tard elle avait attaché un morceau de la corde à un doigt de la petite. Et tandis que Gorgrimm tenait l'enfant elle tira sur le fil. Au bout de quelques instants le doigt de la fillette céda et tomba dans la poussière. Des cris de douleurs s'échappèrent des gorges des deux femmes.
Deliantha se retourna vers la plus âgée.

- Vous êtes un monstre., marmonna celle-ci en pleurant.

- Dois-je faire subir le même sort à ses autres doigts? Ou allez vous vous montrer plus coopérative? Dans le cas échéant je vous laisserai la vie sauve...

Après quelques instants de réflexion la femme répondit:

- Ils sont à Orneval. Avant poste de Bois Brisé...

Avant que l'elfe ait pu prononcer un mot la lame de Gorgrimm s'enfonça dans la poitrine de l'enfant. Sa mère poussa un cri déchirant et fut à son tour tuée par un des soldats.

- Par Elune j'avais dis de leur laisser la vie sauve!

- Zieg a dit de ne laisser aucun survivant.

A ces mots le sang de Deliantha ne fit qu'un tour. Elle saisit promptement sa dague et l'enfonça dans le coeur de l'orc.

- Imbécile", cracha-t'elle.

Tout devenait clair dans son esprit à présent. Son père avait raison, Zieg la manipulait. Il ne la laissait pas mener cette guerre comme elle l'aurait voulue, il ne se servait d'elle que comme d'une arme. Elle n'avait fait que tuer, tuer, et tuer encore. Elle avait fait couler le sang d'innocents dans le seul but d'assouvir sa soif de pouvoir et de conquêtes. L'humain connaissait son point faible et l'avait exploité pour l'amener à faire ce qu'il désirait.

Elle devait en finir avec tout ça. Avec Zieg et son armée. Elle entreprit alors de canaliser un sortilège afin de réduire à néant ce ramassis de mécréants. Poussant sa concentration à son paroxysme elle réussit à invoquer une lame d'air géante qui se mit à tourbillonner autour d'elle et à hacher menu tous les soldats. Des cris inaudibles sortirent de la gorge des suppliciés et le silence revint. Une bouillie infâme d'organes divers jonchait à présent le sol.
L'elfe commençait à s'éloigner de la boucherie quand elle entendit un 'Crac' sonore dans son dos. Elle se retourna et vit Zieg planté là à la regarder. Enfin ce qui aurait pu être Zieg... plus jeune.

"Deliantha... qu'as tu fais? J'ai ressenti la puissance du sort que tu lançais depuis Silithus, c'est pourquoi je suis venu ici... pour découvrir ce carnage. Pourquoi les avoir tué?

- Ils étaient des assassins. Ils le méritaient. C'est quoi ça?, demanda-t'elle en désignant un petit objet accroché à sa ceinture.

- Ca? C'est la raison pour laquelle je t'ai envoyé tuer ces gens. Tu vois... chaque personne tuée par toi ou ces soldats envoyait l'âme de la victime remplir cet artefact, me faisant rajeunir. Extraordinaire n'est ce pas?

- Vous m'avez manipulée... Vous avez fais de moi une meurtrière uniquement pour échapper aux lois de la nature. Vous méritez la mort.

- Certainement, mais qui pourrait me tuer hein? Toi? Tu n'as jamais réussi à m'égratigner en un an de combats.

- Vous me l'avez dis vous même, la persévérance crée la force.

- Ne me dis pas que tu veux...

Avant même qu'il ait fini sa phrase Deliantha s'était élancée sur l'humain avec la rapidité d'un guépard, et tenait maintenant la lame de Flocon fichée dans le bas du dos de Zieg.

- Si, c'est ce que je voulais faire. Ca fait mal n'est ce pas? Ne t'inquiète pas, ça ne durera pas longtemps. (Elle enfonça Étincelle entre ses omoplates) Règle numéro 1: Ne sous estime pas ton adversaire. (Elle s'approcha de l'oreille de Zieg et murmura: ) Un jour viendra où je serai vaincue, mais ce ne sera pas aujourd'hui. Et pas par toi."